La Banque du Japon (BoJ), qui a entamé en 2024 une normalisation de sa politique monétaire, a laissé mercredi 19 mars ses taux inchangés, conformément aux attentes et malgré une inflation persistante, pointant les incertitudes sur la conjoncture économique mondiale.
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Le siège de la Banque du Japon à Tokyo. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
L’institution, au terme d’une réunion de deux jours, a maintenu à 0,5% son taux directeur, qu’elle avait relevé en janvier lors de sa précédente décision.
La BoJ se montre prudente, soulignant les conséquences potentielles de la guerre commerciale tous azimuts déclenchée par le président américain Donald Trump. Les États-Unis ont notamment ciblé directement les exportations d’acier nippones.
« Concernant les risques pesant sur nos perspectives, de grandes incertitudes subsistent quant à l’activité économique au Japon, notamment l’évolution de la situation commerciale (…) et celle des prix des matières premières« , a-t-elle souligné dans un communiqué.
« Je suis préoccupé par l’incertitude entourant l’évolution de l’économie et des prix à l’étranger« , avait déjà déclaré la semaine dernière le gouverneur de la BoJ, Kazuo Ueda, alors que les tensions commerciales pourraient plomber la croissance mondiale.
Ce statu quo de la politique monétaire était largement anticipé par les marchés.
Après une hausse de 0,25 point de pourcentage en janvier, « la BoJ entend évaluer l’impact des récents changements de sa politique monétaire sur l’économie avant de prendre sa prochaine décision« , soulignait Stefan Angrick, de Moody’s Analytics, avant l’annonce.
« Parallèlement, la vague de mesures douanières et de menaces de Washington ont maintenu les marchés financiers sous tension, ce qui renforce pour la BoJ les raisons de rester immobile« , a-t-il ajouté.
D’ailleurs, dans un environnement économique et commercial planétaire précaire et volatil, les banques centrales britannique et américaine devraient également opter cette semaine pour le statu quo.
Afin de contrer le retour de l’inflation au Japon depuis deux ans et demi, la BoJ a entamé en mars 2024 un resserrement de ses taux, après dix ans de politique monétaire ultra-accommodante où ils étaient restés quasi-nuls.
L’institution les a relevés par deux fois l’an dernier, puis à nouveau en janvier.
Revalorisation salariale
De l’avis des analystes, elle devrait reprendre ses relèvements de taux plus tard dans l’année.
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Le drapeau japonais devant le siège de la Banque du Japon, à Tokyo. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
« Le cycle de resserrement de la Banque est encore loin d’être terminé (…) il existe une forte probabilité d’une hausse des taux lors de la réunion de mai de la Banque« , a ainsi réagi Marcel Thieliant, de Capital Economics.
« Après tout, l’inflation est bien supérieure à l’objectif de 2% fixé par la BoJ (…) et les négociations salariales du printemps ont abouti à des hausses de salaires encore plus importantes que l’an dernier, ce qui devrait entraîner de nouvelles pressions à la hausse sur l’inflation au cours des prochains mois« , explique-t-il.
Ainsi les prix à la consommation au Japon (hors produits frais) ont gonflé de 3,2% sur un an en janvier, au plus haut depuis un an et demi, très au-delà de la cible des 2%, sur fond d’envolée des prix des céréales et de l’énergie.
Les prix du riz, qui ont encore enregistré une envolée record de 71,8% sur un an en janvier, « devraient rester à des niveaux élevés en 2025 » en dépit des mesures gouvernementales pour limiter cette hausse, reconnaît la Banque.
La BoJ a par ailleurs noté mercredi 19 mars « une amélioration modérée de la situation de l’emploi et des salaires » – un élément clef pour sa politique monétaire.
La puissante Confédération japonaise des syndicats de travailleurs (Rengo) a ainsi obtenu, dans le cadre des négociations annuelles, une augmentation moyenne de 5,46% des salaires pour ses membres en 2025, la plus forte hausse depuis trois décennies dans l’archipel, face à l’inflation tenace.
La BoJ mise désormais sur un « cercle vertueux » où les revalorisations des salaires permettraient de gonfler la consommation.
AFP/VNA/CVN