Face à la hausse des prix mondiaux du cacao, le Nigeria se positionne pour relancer son secteur de production, en déclin depuis plusieurs décennies. Le pays, septième producteur mondial, voit dans cette dynamique une occasion de rattraper des producteurs historiques comme le Ghana et la Côte d’Ivoire, confrontés à des défis climatiques et sanitaires.
Le secteur nigérian du cacao connaît un regain d’intérêt, soutenu par des investissements importants et l’impulsion du gouvernement. Le mois dernier, l’agence britannique de financement du développement (BII) a injecté 40,5 millions de dollars dans l’entreprise agroalimentaire Johnvents, symbole d’un tournant dans le soutien aux producteurs locaux. Selon Patrick Adebola, directeur exécutif de l’Institut nigérian de recherche sur le cacao (Cocoa Research Institute of Nigeria), l’engouement est palpable : « Les agriculteurs n’ont jamais eu autant de chance », note-t-il.
Le gouvernement nigérian a fixé un objectif de production de 500 000 tonnes de cacao pour la saison 2024-2025, un chiffre qui semble ambitieux à court terme. Toutefois, avec l’injection de nouveaux fonds et une politique favorable, ce but pourrait devenir atteignable dans les années à venir. En 2023, le Nigeria a produit 280 000 tonnes de cacao, bien loin des 650 000 tonnes du Ghana et des plus de 2 millions de tonnes de la Côte d’Ivoire.
La flambée des prix mondiaux du cacao a été un facteur décisif dans l’attrait croissant pour cette culture. En décembre 2024, le prix du cacao a atteint un pic de 12 500 dollars la tonne, un niveau bien au-delà des prix habituels qui oscillaient entre 2 000 et 3 000 dollars ces dernières années. Cette hausse des prix incite les producteurs à se lancer dans la culture du cacao, un secteur jusque-là marginal.
Malgré les progrès réalisés, des obstacles demeurent. Une étude publiée dans la revue Agroforestry Systems a mis en garde contre les risques environnementaux liés à l’expansion des plantations de cacao en monoculture, au détriment de méthodes agroforestières plus durables. Les petites exploitations agricoles, qui dominent la production nigériane, manquent souvent de moyens financiers pour investir dans l’extension de leurs plantations.
Le manque de terres et de capitaux pour l’agriculture est un autre frein. Peter Okunde, un agriculteur nigérian, souligne qu’il lui est difficile d’étendre ses quatre hectares de cacao faute de ressources financières et foncières. Cependant, les autorités nigérianes se montrent optimistes et soutiennent la modernisation du secteur, notamment à travers des initiatives comme la création en 2022 d’un Comité national de gestion du cacao.
L’avenir de la production de cacao au Nigeria dépendra en grande partie de la capacité du gouvernement à équilibrer la croissance rapide de la production avec des pratiques agricoles durables. Alors que le pays se tourne vers l’exportation de plus de cacao, il doit éviter les erreurs du passé et favoriser des méthodes agricoles respectueuses de l’environnement. La clé réside dans un soutien continu aux petits producteurs et dans des politiques publiques qui privilégient la durabilité à long terme.