Synthia Bussières a-t-elle mis en scène sa propre mort ? A-t-elle tué ses deux fils avant de tenter de tuer son conjoint Mohamed Al Ballouz ? Cette hypothèse étonnante a été lancée par l’accusée lundi. Une théorie à mille lieues de celle de la Couronne, qui affirme plutôt que le père est l’auteur des trois meurtres
L’accusée, qui s’identifie maintenant comme une femme, a offert au jury lundi un aperçu de sa défense dans des questions posées à la biologiste judiciaire, une témoin de la poursuite. Comme l’accusée se représente seule, c’est elle qui contre-interroge les témoins.
« Si je vous soumets que Synthia Bussières a tué les deux enfants et aurait tenté de tuer l’accusée par la suite, seriez-vous en mesure de donner votre opinion d’experte ? », a lancé l’accusée.
« Non », a répliqué l’experte. « Je ne peux pas tirer de conclusion avec les projections de sang. Je ne peux pas faire de séquences d’évènements. Je ne peux pas dire ce qui s’est passé », a expliqué Maria Fiorillo, biologiste judiciaire et spécialiste en projection de sang.

ILLUSTRATION MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE
La femme trans de 38 ans, qui se présente comme Levana Ballouz au procès, est accusée du meurtre au second degré de sa conjointe Synthia Bussières et des meurtres au premier degré de leurs enfants.
Dans une autre question en contre-interrogatoire, cette fois sur la présence d’une trace de sang au plafond de la douche, l’accusée a lancé cette hypothèse qui a de quoi surprendre :
« Synthia Bussières aurait pu faire une mise en scène et projeter du sang sur le plafond avec une main ensanglantée avant qu’il y ait eu altercation », a suggéré l’accusée.
Tentatives de nettoyage
La femme trans de 38 ans, qui se présente comme Levana Ballouz au procès, est accusée du meurtre au second degré de sa conjointe Synthia Bussières et des meurtres au premier degré de leurs enfants Zac, 2 ans, et Eliam, 5 ans.

PHOTO DÉPOSÉE EN PREUVE
Un portrait de famille retrouvé dans l’appartement
Selon la théorie de la Couronne, Mohamed Al Ballouz, alors un homme, a tué sa conjointe en la poignardant à une vingtaine de reprises, le 25 septembre 2022, à Brossard. Il a ensuite tué ses deux fils, démarré un incendie au pied du lit et ingurgité du lave-glace pour se suicider. Entre-temps, il avait tenté de nettoyer l’appartement, toujours selon la Couronne.
Le témoignage de l’experte en biologie judiciaire lundi a mis en lumière les nombreuses tentatives de nettoyage effectuées dans l’appartement. Le sang de Mohamed Al Ballouz a notamment été retrouvé sur le manche d’une vadrouille imbibée de sang et sur la porte de la laveuse.

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Le sang d’Al Ballouz a été retrouvé sur la laveuse.
« Il y a eu du nettoyage de sang dans la salle de bains, sur le pourtour de l’évier, sur le robinet, sur le pressoir à savon. Il y a du sang dilué à plusieurs endroits dans la douche, aussi compatible avec du nettoyage de sang », a témoigné Maria Fiorillo.
Également, le sang de Mohamed Al Ballouz a été décelé sur les quatre détecteurs de fumée, selon l’experte. Les appareils de détection se sont retrouvés dans l’amas d’objets utilisés pour allumer un incendie au pied du lit. Dans une question posée en contre-interrogatoire, l’accusée a laissé entendre qu’elle aurait plutôt tenté de « remettre le détecteur de fumée en place ».
Quelques petites traces du sang de Mohamed Al Ballouz ont aussi été retrouvées dans la chambre des enfants, au niveau du protège-matelas d’un lit, ainsi que sur la commode des enfants.
Selon la biologiste judiciaire, une accumulation de sang appartenant à Synthia Bussières se trouvait dans la salle de bains, au niveau du bain. C’est là que son corps a été retrouvé par les premiers répondants. Les projections de sang démontrent que la personne ensanglantée était en position basse.
À plusieurs endroits, toutefois, se trouvaient le sang de Synthia Bussières et celui de Mohamed Al Ballouz. Selon l’experte, il est possible pour une personne qui vient d’en poignarder une autre de propager le sang de la victime. Le procès se poursuit mardi au palais de justice de Longueuil.
(Avec La Presse)